Lois Weinberger
Du 25 juin au 28 août 2022Vernissage le samedi 25 juin 2022, à partir de 14h30
Vidéo de l’exposition Lois Weinberger en Verrière du 25 juin au 28 août 2022
Réalisation et montage : Thomas James
© Les Tanneries – Centre d’art contemporain, Amilly, 2021-2022
Courtesy de l’artiste et de la galerie Salle Principale
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Lois Weinberger
Vue de l’exposition éponyme
Verrière
Photo : Les Tanneries – CAC, Amilly, 2022
Courtesy Salle Principale, Paris
Lois Weinberger
Vue de l’exposition éponyme
Verrière
Photo : Les Tanneries – CAC, Amilly, 2022
Courtesy Salle Principale, Paris
Lois Weinberger
Portable Garden, 1994 (détail)
Vue de l’exposition Lois Weinberger
Verrière
Photo : Les Tanneries – CAC, Amilly, 2022
Courtesy Salle Principale, Paris
Lois Weinberger
Garden, 1997
Vue de l’exposition Lois Weinberger
Verrière
Les Tanneries – CAC, Amilly, 2022
Photo : Aurélien Mole
Courtesy Salle Principale, Paris
Lois Weinberger
Garden, 1997 (détail)
Vue de l’exposition Lois Weinberger
Verrière
Les Tanneries – CAC, Amilly, 2022
Photo : Aurélien Mole
Courtesy Salle Principale, Paris
Lois Weinberger
Vue de l’exposition éponyme
Verrière
Les Tanneries – CAC, Amilly, 2022
Photo : Aurélien Mole
Courtesy Salle Principale, Paris
Lois Weinberger
Text boards, 2017
Vue de l’exposition Lois Weinberger
Verrière
Les Tanneries – CAC, Amilly, 2022
Photo : Aurélien Mole
Courtesy Salle Principale, Paris
Lois Weinberger
Vue de l’exposition éponyme
Verrière
Les Tanneries – CAC, Amilly, 2022
Photo : Aurélien Mole
Courtesy Salle Principale, Paris
Lois Weinberger
Portable Garden, 1994
Vue de l’exposition Lois Weinberger
Verrière
Photo : Les Tanneries – CAC, Amilly, 2022
Courtesy Salle Principale, Paris
« L’écho de l’origine reste vivace »
Lois Weinberger, extrait tiré de Text boards, 2017
Issue d’un véritable travail de collaboration avec la galerie Salle Principale (Paris) qui représente le travail de l’artiste, l’exposition de Lois Weinberger (né en 1947 à Stams, mort en 2020 à Vienne) présentée dans la Verrière cherche à exaucer autant qu’à prolonger les recherches de l’artiste sur les relations qu’entretiennent l’homme et la nature, la nature et la culture, allant parfois jusqu’à détourner de manière proprement inédite les protocoles de réactivation de certaines œuvres exposées pour mieux laisser s’exprimer, et ce dans leurs entrecroisements mêmes, tout leur potentiel poétique comme politique.
Composée de simples sacs de transport dits « d’immigrés » aux motifs entrelacés remplis de terre récupérée sur le territoire qui environne le lieu de leur exposition, l’œuvre à protocole Portable Garden (1994) a été pensée par Lois Weinberger pour être exposée en extérieur – offerte à la nature, au vent, aux oiseaux –, dans des espaces de l’entre-deux, de l’en dehors, depuis les interstices jusqu’aux non-lieux, depuis les terrains vagues jusqu’aux zones périphériques, en friche comme à la marge. L’idée étant de les y abandonnés sur une durée d’au moins un an afin que du vivant finisse par y germer, à la faveur de dynamiques d’ensemencements naturels, et par s’y développer au point de faire corps avec la végétation environnante et de réduire les sacs plastiques d’origine à une forme d’invisibilité dont les échos restent néanmoins vivaces, entre enracinements et recyclages divers.
Véritable réflexion sensible sur les processus migratoires et d’intégration progressive d’un corps étranger à un territoire singulier – qu’il vient enrichir et rééchanter –, de dépossession comme de repossession, l’œuvre est ici réinterprétée puisque présentée en intérieur. Ainsi, le plus extérieur des espaces intérieurs du centre d’art qui conserve les traces de son passé industriel et de friche — tels que ces tags imprégnés à la surface de ses murs —, se transforme-t-il momentanément pour l’occasion en serre aride, en « terre » d’accueil dont la beauté solaire n’a d’égale que l’hostilité désertique.
Les capacités d’adaptation et de développement des jardins portables pensés par Lois Weinberger et disposés dans ces conditions sont dès lors poussées à l’extrême. Laissés à la merci d’un soleil de plomb dont la chaleur irradie et vient imprégner le sol bétonné sur lequel ils reposent, les cinquante jardins bricolés et autonomes dont la terre rapportée par les publics du centre d’art provient de tout le bassin montargois sont soumis à rude épreuve. Aussi est-on en mesure de se demander si du vivant y trouvera sa place pour finalement prendre le pas sur les sacs. Des espèces rudérales [1] seront-elles assez opiniâtres et audacieuses pour venir braver ce désert et laisser ainsi penser la possibilité « d’un futur où fleurir » ? Et, si oui, seront-elles néophytes, indigènes ou peut-être même les deux ? C’est toute la question qui se pose au regard du déplacement, de la migration au carré, de ces jardins prévus pour l’extérieur — et d’abord laissés en jachères sur le Parvis du centre d’art — vers l’intérieur. Si l’on peut gager que l’installation ne disparaitra pas au contact de son environnement végétal de proximité, c’est tout son libre mais néanmoins préconçu devenir qui se trouve ici réinterrogé à l’aune de ce dispositif revisité d’émergence de l’art « par nature ». Dispositif revisité qui semble dédoubler nos attentes comme le caractère latent de la poésie ainsi générée, ce que n’aurait sans doute pas renié l’artiste.
D’une certaine manière, le glissement protocolaire effectué rapproche désormais plus significativement l’installation Portable Garden de la sculpture sur socle Garden (1997) dans leur manière d’être à la fois déracinés et enracinés. Les racines de Garden, quant à elles, s’inscrivent et puisent littéralement dans l’usage des mots puisque la plante rudérale qui constitue ce micro-jardin trouve les conditions de son expansion en étant lovée tout autant qu’emprisonnée au creux d’une pile de journaux quotidiens principalement imprimés de la langue du pays dans lequel l’œuvre est exposée — ici glanés auprès des membres de l’équipe et autres publics et intervenants du centre d’art. Légèrement imbibée d’eau, cette dernière voit ses encres progressivement se mouvoir pour, peut-être, venir infuser directement les lignes du lierre qui s’en échappe, semblant, après une étrange opération d’assimilation du langage, se faufiler vers d’autres destins, et dont la beauté profondément hybride et presqu’inattendue est ici mise en lumière et sur un piédestal bien qu’enserrée dans un bac en plastique.
À la fois simulacres et vérités d’une nature qui reprend ses droits dans une forme de liberté paradoxale prise entre « insouciance précise » et « [perfection] provisoire », les œuvres Garden et Portable Garden ainsi remises en jeu et en dialogue invitent à repenser les dynamiques de déracinements, d’enracinements du vivant au sein d’un cadre spécifique – naturel, culturel et même artistique – qu’il vient décaler pour mieux contredire ou encore dépasser nos attentes. Véritables jardins en latence, habités de nos poignées de terre, de nos langages et de nos pensées vagabondes, ces deux œuvres ouvrent un nouvel espace de rêveries pour les promeneurs solitaires contemporains que nous sommes tout en interrogeant profondément, dans leur caractère collaboratif même, l’esprit (du) collectif et notre manière de faire monde.
En cela, Garden et Portable Garden entrent subtilement en écho avec la série de poèmes composés par Lois Weinberger entre 1990 et 2009 qui répond au nom de Text boards (2017) et repose sur des panneaux d’affichage en bois regroupés au sein de la Verrière, telle une communauté d’esprit dont les mots finissent par parcourir l’ensemble de l’espace à la faveur d’un maillage parcimonieux mais travaillé au fil des œuvres qui laisse place à de multiples foisonnements et fourmillements.
Au gré des mutations, des transmutations, des hybridations et autres expérimentations appliquées qui les façonnent et qu’ils engendrent, les jardins de surface et des profondeurs de Lois Weinberger, qu’ils soient de terre, de plantes ou de mots, résonnent comme ils raisonnent avec nos jardins secrets, en nos âmes et consciences. L’artiste continue ainsi, à travers nous, de cultiver une forme de beauté du quotidien comme une poétique de la coexistence, loin d’une vision idéalisée des rapports entre nature et culture et au plus près de leurs ambivalences, entre visibilités, invisibilité et infra-visibilités, échelles micro et macroscopiques, éphémérité et cycles infinis, racines et ramifications.
Communiqué de presse de l’exposition
[1] Les plantes rudérales sont des plantes qui poussent spontanément dans un espace rudéral, c’est-à-dire un milieu anthropisé modifié du fait de l’activité ou de la présence humaine.
PARTENAIRE DE L’EXPOSITION :
Avec l’aimable participation de la galerie Salle Principale (Paris).
REMERCIEMENTS :
Les Tanneries – Centre d’art contemporain remercient chaleureusement les membres de l’équipe et les publics qui ont contribué à l’œuvre Portable Garden en y apportant un peu de leur terre tout au long du mois de mai et, notamment, les nombreux élèves et enseignants de l’École primaire des Catalpas de Villemandeur, de l’École élémentaire Marc O’Neil de Lorris, de l’École élémentaire de Chilleurs-aux-bois, de l’École élémentaire de Saint-Firmin-des-Bois, de l’École primaire Pasteur à Montargis, de l’École primaire Albert Thierry à Montargis, de l’École primaire Maurice Meunier à Montargis, de l’École primaire de Fontenay-sur-Loing et de l’E.R.E.A. Simone Veil d’Amilly.